À quoi ressemble le Village Olympique - et à quoi va-t-il servir après les JO de Paris 2024 ?
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Livré au Comité d’Organisation de Paris 2024 le 28 février 2024 et inauguré au printemps, le Village olympique, situé sur les communes de Saint-Denis, Saint-Ouen et L’Île-Saint-Denis, est le fruit de six années de construction. Il fait partie des 70 ouvrages nécessaires au bon fonctionnement des JO pour un budget estimé à 4,4 milliards d'euros. A quoi ressemble-t-il et quel sera son usage après les JO ? Enquête.
L’évolution du Village olympique : c’était mieux avant ?
En un siècle, il a bien évolué ! Celui de Paris 2024 ne ressemble en rien au précédent lieu d’hébergement des JO de Paris en 1924. À l’époque, une soixantaine de maisonnettes en bois avaient été rapidement montées à Colombe. Aux détours des rues, les athlètes pouvaient y trouver un salon de coiffure, un bureau de change, un kiosque à journaux, un bureau de poste ou encore un service de blanchissage. Ce premier lieu d'hébergement des athlètes fut décrié dans les journaux, notamment en raison des conditions de logement et de nourriture jugés déplorables. Les cabanons de bois ont été détruits après l’évènement sportif et aujourd’hui, rien ne laisse supposer qu'ils ont pu exister…
Par la suite, les Villages olympiques ont été conservés. C’est le cas lors des JO de Berlin en 1936 - prétextes à propagande pour les nazis au pouvoir. Le Village olympique, bâti en dur, fut ensuite utilisé pour des besoins militaires. D’autres sont depuis devenus des lieux de résidence, contrairement à celui de Lake Placid (1980) transformé en prison.
Cent ans tout pile après le premier Village olympique, celui de Paris 2024 voit le jour. Un symbole fort pour la capitale et le Comité International Olympique. Est-il, comme la grande majorité des autres lieux d’hébergement des athlètes, destiné à être un nouveau quartier ?
Qui se cache derrière le projet du Village olympique de Paris 2024 ?
Chantier de grande ampleur, le Village olympique est un projet un peu trop alambiqué si on n’en connaît pas les rouages. Le plan de masse, à savoir, la représentation aérienne et graphique du village, a été dessiné par l’architecte et urbaniste Dominique Perrault dès 2018. Son ambition était alors de créer un lieu de vie qui s’articule comme un "quartier métropolitain, ouvert et innovant".
Pour faire sortir de terre le Village, la Société de Livraison des Ouvrages Olympiques (SOLIDEO) a été créée en 2017. Un établissement public à la fois "financeur, aménageur, et superviseur" du projet, dont le rôle est de regrouper les financements publics - État, ville de Paris, région Île-de-France, départements limitrophes, etc. - destinés à la construction des édifices olympiques. C’est à elle qu’a été confiée la tâche d’assurer la construction ou la rénovation des équipements pérennes utilisés pour les Jeux Olympiques, le principal étant le Village des sportifs.
Derrière le développement du Village olympique, c’est le savoir-faire français qui se doit d’être valorisé avec l’intervention d’entreprises et de professionnels hexagonaux.
Le chantier en chiffres, ça donne quoi ? Tout au long de la construction du Village olympique, ce sont 14 maîtres d’ouvrage, 41 architectes, 3 500 ouvriers au pic, 37 grues mobilisées en simultané qui se sont activés !
À quoi ressemble le Village olympique ?
Pour pouvoir accueillir les 14 250 athlètes et accompagnants pendant les Jeux olympiques et les 9 000 para-athlètes et accompagnants pendant les Jeux paralympiques, le chantier du village n’a pas été pensé à moitié.
Le Village olympique n’a pas été imaginé comme un seul ensemble, mais comme des secteurs dont chacun est chapeauté par une entreprise maître d’ouvrage à l’instar de Vinci, Pichet-Legendre ou encore l’association de Nexity mandataire, Eiffage Immobilier et CDC Habitat.
Chaque secteur est unique, doit répondre à un calendrier, sera occupé par un nombre bien défini d’athlètes, est destiné à une "utilisation héritage" (une autre fonction) et doit respecter des caractéristiques environnementales. Car s’il existe un axe autour duquel s’articule ce projet d’envergure, c’est bien l’écologie, le respect de l’environnement, la limitation du bilan carbone, l’emploi d’une économie circulaire - l’ancienne friche occupant le lieu a permis de concasser 35 000 tonnes de béton ensuite réutilisé dans la création de voiries - ou la présence d’une biodiversité.
Tout est plutôt finement pensé : maximiser le recours à une énergie propre et renouvelable, créer des bâtiments proposant une grande inertie et une ventilation naturelle, récupérer les eaux pluviales, créer un réseau de géothermie, expérimenter de nouveaux matériaux.
La construction du Village olympique Paris 2024 s’appuie sur trois objectifs qui définissent une stratégie environnementale :
Réduire les émissions de carbone pour tendre vers la neutralité carbone à horizon 2050,
Garantir un confort thermique en ville à horizon 2050 ;
Voir la ville comme un support de la biodiversité à horizon 2050.
La signalétique inclusive multisensorielle est une partie importante du projet puisque le Village doit être accessible à tous et en toute sécurité. Le but est d'"offrir un environnement signalétique qui facilite l’orientation de tous les usagers, notamment les personnes déficientes visuelles, déficientes intellectuelles et cognitives, ou les personnes ne maîtrisant pas la lecture" (Source : SOLIDEO).
Et après ?
Il n’était même pas dessiné que le projet du Village olympique se voulait déjà pérenne avec la possibilité de changer de visage. Comme le souligne l’architecte Dominique Perrault sur son site Internet, la démarche amorcée - et désormais achevée - est "une réflexion de long terme ayant pour objectif la constitution d’un nouveau quartier durable, un morceau de ville offert à tous, ancré sur son territoire et sa géographie".
Depuis septembre 2023, ce sont les élèves d’une des deux écoles maternelles et primaires prévues à proximité du Village olympique qui ont foulé le sol de salles de classe flambant neuves. Ce début d’occupation des lieux a pour but de préparer l’accueil des futurs habitants du quartier. Le lycée Marcel Cachin, déjà existant à Saint-Ouen, a été entièrement rénové et, non loin de là, vient d’être créé un campus dans lequel se côtoieront des élèves en écoles de kinésithérapie et d’ingénieurs, mais aussi en filières sportives.
Côté "sécurité", un espace est prévu pour accueillir un centre de formation pour jeunes sapeurs-pompiers et un établissement flottant pour la brigade fluviale.
Au total, ce sont 6 000 nouveaux résidents et 6 000 salariés qui permettront au Village olympique de partir sur une nouvelle dynamique. Mais l’accueil de ces nouvelles populations ne sera pas immédiat. Il faudra patienter quelques mois supplémentaires (jusqu’en 2025 au moins) pour espérer voir (re)vivre le secteur. Étant donné qu’aucune cuisine n’a été installée dans les chambres des athlètes, des travaux seront nécessaires après les Jeux olympiques et les Jeux paralympiques pour rendre fonctionnels les logements familiaux et étudiants, mais aussi les bureaux. Pour finir, commerces et services viendront occuper les rez-de-chaussée des immeubles, apportant une plus grande qualité de vie aux habitants.
Le Village olympique en chiffres (source : SOLIDEO)
3 communes : Saint-Denis, Saint-Ouen et L’Île-Saint-Denis
47 % de réduction du bilan carbone sur l’ensemble du cycle de vie
52 hectares (environ 70 terrains de football) et 330 000 m2 de surface de plancher aménagés
1749 entreprises ont travaillé dont 1361 TPE/PME, venant de 70 départements français
6 000 nouveaux habitants – 2 807 logements au total
6 000 nouveaux salariés
2 nouveaux groupes scolaires (maternelle et élémentaire) – 35 classes
9 000 arbres et arbustes plantés
6 hectares d’espaces verts publics et 1,5 hectare de cœurs d’îlots réaménagés
1 kilomètre de promenade piétonne aménagé en berges de Seine
Si le Village olympique est voué à être éphémère, ses constructions, elles, resteront debout. Ces structures neuves perdureront, entre le souvenir d’un événement international qui fait rêver tant de monde et une vie plus classique où des anonymes se croiseront dans ce quartier d’abord foulé par des stars olympiques et paralympiques.